{Vie d’expat} Ces 7 ans qui ont changé notre vie !

C’est un anniversaire qu’on ne peut pas manquer. Il y a 7 ans nous arrivions par un après-midi d’orage dans la Baie de San Francisco, avec nos valises et notre gueule de gens fatigués. Nous entraînions avec nous nos 4 enfants. Intérieurement, je me doutais déjà que c’était un voyage sans retour. Dur et même si chaque année, nous avons une pensée pour ce jour-là, le 1er novembre passe quasi inaperçu maintenant. Nous en parlons à peine, comme si il fallait éliminer de nos souvenirs, cette sorte de souffrance qui nous avait tous saisis. A chaque Halloween, nous replongeons dans ces tourments : à cette heure-ci, nous étions dans le taxi, à cette heure-ci, nous étions dans l’avion, à cette heure-ci, nous arrivions. Vertige d’un voyage qui s’était terminé dans cet orage mémorable à notre arrivée.

Mais ainsi va la vie d’expat, les anniversaires sont multiples et c’est toujours à l’automne que je ressens le même malaise, celui que j’avais éprouvé en arrivant dans cette terre inconnue alors.

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A refaire tous nos repères, j’avais bien sur essuyé pas mal de larmes chez mes enfants. 2008, cette fin d’année avait été une année de transition qui s’était répétée quelque 3 ans après quand nous avions quitté ce pays que nous avions adopté et tant arpenté : la Californie. Re-belotte en terre inconnue, décidément, l’automne rime beaucoup chez nous, avec adaptation et réajustement. 7 ans qui ont tout changé car en cette 7ème année d’ex-patriation (en dehors de notre patrie), nous avons pris une décision irrémédiable, celle de devenir américain.

american dream

Le bilan de ces 7 ans

  • des milliers de kilomètres arpentés, entre la Californie et le Kansas et maintenant, un peu du côté de la côte Est : un esprit qui a complètement adopté cet espace au point d’en connaître presque tous les recoins ou du moins avoir découvert des lieux improbables le long de la Route 66 ou au fin fond du Midwest, et bien sur, dans l’Ouest.
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en violet, nos roadtrips depuis 2008 Boston-Montreal et Quebec : 2013 et 2015 en vert, quand j’avais 19 ans et en rose, 18 ans
  • Etre passés au travers de deux processus d’immigration, pour décrocher dans un premier temps, la green card, puis la naturalisation,
  • avoir enfin un peu saisi le fonctionnement du gouvernement américain en révisant les 100 questions de notre interview de citizenship, et en tirer une certaine fierté quand tous les américains à qui nous en avons parlé, nous ont déclaré qu’ils ne seraient pas sûrs d’en savoir autant…
  • pouvoir voter aux prochaines élections présidentielles et du coup ne plus se sentir en marge,
  • enfin, avoir relevé le défi de nous adapter à Kansas City en venant de l’endroit le plus geek et le plus libéral des US et de se dire que nous avions finalement tout gagné avec ce changement.

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Et nous et nous !

  • des enfants qui ne savent plus si ils sont vraiment encore français et qui n’ont que la pratique de leur langue maternelle dans notre cercle restreint, notre petit French Quarter à la maison,

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  • une grande, Mahault, qui a préféré s’installer en pays bilingue (Québec) pour continuer ses études, s’éloignant un peu de la pesanteur ressentie en arrivant au Kansas,

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  • une seconde, Amy, qui finit brillamment sa scolarité américaine, ayant complètement adopté les codes, us et coutumes de son école qui me paraissent tellllllement loin de ce que j’ai connus,

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  • une troisième qui prend le même chemin, tout en marquant sa différence,
  • et un petit quatrième, qui parle mieux anglais que français, mais qui essaye toujours de trouver ses mots pour coller au code maison : ici, on ne parle que FRANCAIS.
  • Un mari qui ne travaille qu’en anglais, et qui jongle toujours entre 6 fuseaux horaires (Californie, KC, Boston, UK, France et Asie),
  • et moi qui, m’accroche à mon français à travers ce blog, qui a créé ma propre activité en alliant mes compétences et ma francophonie, et qui surtout a vu sa compréhension de l’anglais, des codes et des valeurs locales croître de 350% dans ces 4 dernières années, au point de ne plus avoir peur de participer à des actions à l’école, de pouvoir écouter la radio et comprendre 90% de ce qui s’y dit.

pharmacie

Les changements d’habitudes

Dans les changements d’habitude, en vrac j’énoncerais :

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  • avoir découvert le blues et être devenu accroc à la musique locale, au point de sortir en semaine dans les boui-bouis et autres endroits improbables de Kansas City, pour aller écouter nos nouvelles idoles,
  • aller encourager ma fille lors de ses compétitions de cross country, ou aller écouter bouche-bée son concert de symphonic orchestra,
  • être devenue fan de la dernière heure de baseball, au point d’accepter d’aller me fourrer dans une foule compacte  de 600 000 personnes.
  • dîner parfois à 5h30 de l’après-midi et trouver cela normal,
  • avoir la flemme de faire à manger et aller chercher du take away, ou entraîner ma famille dans une taverne pour manger des tacos ou des burgers, dans un Mongolian BBQ, un chinois ou le thaï du coin, voir l’éthiopien,
  • commencer à acheter mes décorations de Noël en plein mois d’août,
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il était trop cute ! J’ai pas pu resister !

 

  • me demander ce que l’on va manger le soir de Thanks Giving, et autoriser ma fille à aller faire les premiers shoppings de Black Friday à 3h du matin avec sa meilleure copine,
  • ne plus m’étonner des variations de prix de l’essence, mais courir faire le plein, quand je vois, qu’une des stations que je croise, vient d’augmenter le prix de 20 cents, en espérant que je trouverai encore une station n’ayant pas encore monté ses prix,
  • aller acheter un paquet de chewing-gum, pour récupérer du cash-back,
  • téléphoner au volant (ce n’est pas interdit au Kansas, mais cela l’était en Californie),
  • commencer à me passionner pour la campagne présidentielle, avoir déjà suivi un débat des candidats, et comprendre pourquoi Donald Trump est vraiment un crétin .. oups pardon, ça m’a échappé ! ;
  • m’être déjà arrachée les cheveux en payant, la modique somme de 200$, un médicament nécessaire à mon mari, mais ayant déjà couru d’une pharmacie à l’autre pour faire 50$ d’économie sur une crème prescrite,
  • être devenue hyper sociable, au point de ne plus m’étonner qu’un caissier me demande si je vais bien, ou qu’un inconnu me dise qu’il aime bien mon tee-shirt,
  • enfin, être habituée à la question “Where are you from”, que l’on me dit SYSTEMATIQUEMENT dès lors que j’ouvre la bouche (et pourtant, je pense avoir fait ENORMEMENT de progrets quant à ma prononciation et à mon anglais).

Voilà, le chemin, reste encore long avant une parfaite intégration, mais pourtant 7 ans c’était finalement un cap à passer, celui de l’âge de raison ..

S’installer et s’intégrer dans un pays, ce n’est pas si facile car même après 7 ans, je n’en connais pas tous les us et coutumes, ni tous les codes.

S’intégrer, c’est comprendre peu à peu ces ondes que l’on n’arrive pas à saisir du premier coup, ces choses invisibles et indescriptibles qui nous seront toujours inaccessibles car nous ne sommes pas tombés dedans quand nous étions petits.

S’intégrer c’est aussi, se confronter à certaines valeurs vers lesquelles on ne souhaite pas aller.

S’intégrer ce n’est pas se renier ni renier ses valeurs,

S’intégrer ce n’est pas gommer son identité, c’est finalement faire le tri et essayer de ne garder que le meilleur de ces deux cultures,

S’intégrer c’est aussi accepter de voir grandir ses propres enfants avec des codes différents, en maintenant tant bien que mal son énergie pour qu’ils n’oublient pas d’où ils viennent et qu’ils ne perdent pas leurs racines en concilliant ce double héritage.

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10 Comments

  1. says: Sara

    Joyeux 7 ans d’expatriation !
    Un beau bilan de ces 7 années d’expatriation aux Etats-Unis !
    Je vous souhaite encore de nombreuses belles années à KC ou ailleurs 🙂

  2. says: Ophélie G.

    J’adore les articles bilans des expatriés, c’est toujours super intéressant ! Sept ans, ça me paraît tellement énorme – je ne suis en Angleterre que depuis un peu plus d’un an. Et quand je vois que vous êtes partis avec vos enfants, quel courage ! xx

  3. says: Gwen C.

    Très bel article 🙂

    Par contre, j’espère que tu es en kit main libre ou Bluethooth quand tu téléphones au volant… C’est autorisé certes, mais ça reste dangereux…

    Sinon, peux-tu m’expliquer ce qu’est le cash-back ? Je ne connais pas…

    Happy 7th Anniversary! 😉

    1. says: Isabelle

      yes merci .. alors euh pour le téléphone une fois oui, une fois non .. je sais 0 excuse et pour le cash back : tu paies avec ta debit card ton paquet de chewing gum or whatever et tu demandes 20$ en cash et c’est débité directement sur ton compte .. pratique pour ne pas à avoir à courrir dans un distributeur

  4. says: Mylene

    Un joli bilan, vous avez vécu beaucoup de situations différentes d’expats français aux USA, entre la Californie, le Kansas (est-ce que ce n’était pas presque un plus gros saut de faire Cal->KC que France->Cal finalement?), les enfants à l’école de différents niveaux, les changements de statuts, etc. Chapeau d’arriver à gérer tout ça d’ailleurs, en plus des activités professionnelles, du blog, des voyages !
    D’ailleurs, la carte où tu as tracé tous les endroits visités est impressionnante !

    1. says: Isabelle

      Merci Mylene : oui, je pense que le challenge était bien plus grand d’arriver à KC que en Californie, parce-qu’on laissait beaucoup en Californie : un statut d’expat confortable, une communeauté française omniprésente, des scolarités en français, des amis, des paysages manifiques .. la Californie quoi .. et nous plongions dans l’inconnue sans connaître personne, en perdant totalement tout lien avec la France au niveau administratif et en étant confronté à des choses totalement différentes : mentalité.. Mais au final, la douceur de vie ici, la qualité de vie bien supérieure à celle de la Californie, mais aussi la gentillesse des gens même si au départ ce n’était pas facile de rentrer en contact et d’avoir une discussion, tout cela font que 4 ans après, nous y sommes bien

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